Economie
et Société
de l'Occident
médiéval
.
responsable
.
Monique Bourin
Les orientations
fondamentales des années précédentes demeurent, principalement
l'utilisation, mêlée aux approches historiques, de problématiques
inspirées par des disciplines connexes, traitant des mécanismes
de l'économie. La richesse de telles rencontres s'est totalement
vérifiée. Outre l'intérêt que les historiens
médiévistes ont éprouvé à énoncer
leurs problématiques, à présenter leurs sources et
à évaluer leurs résultats à l'aune d'autres
approches disciplinaires, principalement celles des économistes
et celles des ethnographes, ils se sont révélés
un intermédiaire utile, interlocuteur à mi-chemin de disciplines
antagonistes. Les études sur le marché de la terre ont été
le révélateur le plus aigu de l'intérêt que
les médiévistes ont à aborder ce domaine entre les
analyses des transactions telles que les pratiquent les anthropologues
et les méthodes de modélisation que pratiquent les économistes.
Ces rencontres avec des
spécialistes de l'anthropologie économique et des économistes
nous ont amenés, paradoxalement, à reconsidérer nos
sources avec moins de misérabilisme. Si la critique des séries
chiffrées demeure cruciale, il est des processus de validation statistique
adaptés à nos corpus et qui permettent des résultats
« robustes », surtout si une analyse préalable de type
anthropologique permet de ne jamais perdre de vue le poids du lien social
et de le mettre à sa juste place. Les enjeux demeurent là
: ne pas renoncer à l'analyse de mécanismes économiques,
sous le prétexte que le marché des échanges au Moyen
Age n'est pas celui de la concurrence pure et parfaite et que le paysan
médiéval n'est pas un homo economicus (pas plus d'ailleurs
que l'Européen de l'an 2000) et mais chercher à démonter
les rouages de « sa » rationalité. Une collaboration
régulière s'est établie, que concrétisent notamment
la fréquentation par les étudiants des séminaires
des médiévistes (Territoires
et Communauté et le séminaire de François Menant rue
d'Ulm) et de celui du Laboratoire
des Sciences Sociales de la rue d'Ulm de Florence Weber.
Il continue à peser
sur l'histoire économique et sociale, notamment en France, une réelle
désaffection chez les très jeunes chercheurs. Peu de thèses
sont soutenues dans ce champ de la recherche médiévistique.
La nécessité de constituer des programmes internationaux
est donc sans doute encore plus forte dans ce domaine que dans d'autres.
L'expérience de
ce travail international nous a montré combien les approches historiographique
étaient encore différentes d'un pays à l'autre, fortes
de sources différentes, mais aussi de traditions et d'influences
variées. La démarche comparatiste n'y trouve que plus de
justification encore.
Le recentrage des études
économiques et sociales, très majoritairement consacrées
au monde méditerranéen vers d'autres régions européennes,
recentrage qui paraissait souhaitable en 1998, est évidemment solidement
maintenu. Il est d'ailleurs sans aucun doute en cours, dans ce domaine
de recherche peut-être moins vite que dans d'autres, mais il est
sensible et il est utile de le confirmer.
Le programme initial était
fait de plusieurs thèmes. Présentés et discutés
lors d'un séminaire préliminaire en 1998, ils ont été
retenus comme des domaines de recherche sur le long terme. D'emblée
il a été choisi de les traiter en parallèle, selon
une chronologie « tressée », tant les échos sont
évidents entre les thèmes.Ce programme est loin d'être
épuisé. Aucun des programmes ne peut être considéré
comme achevé. Les recherches, plus ou moins amples et ambitieuses
selon les thèmes, prévues selon un long calendrier, ont d'ailleurs
été conduites à des rythmes différents.
Le
concept de conjoncture en histoire médiévale
Le quatrième projet,
proposé lors de la réunion fondatrice de notre équipe
de travail, à Noirmoutier en 1998, visait à comparer les
approches archéologiques et textuelles de la conjoncture. Il ne
rencontra pas vraiment l'adhésion des collaborateurs, ou peut-être
plutôt une inquiétude à le mettre en euvre. Pourtant
la collaboration continue avec des collègues anglais et d'autres
rencontres nous ont convaincus de l'utilité de reprendre les conclusions
du modèle malthusien de Postan et Duby à propos de la conjoncture
des environs de 1300, comme l'ont fait plusieurs historiens anglais récemment.
Il n'y a pas d'équivalent pour le monde méditerranéen
à l'ouvrage de William Jordan, The Great Famine. De nombreuses
raisons poussent donc au désir de reprendre, au moins sur des bases
textuelles, et si possible en s'appuyant sur des données archéologiques,
le problème spécifique de la conjoncture aux environs de
1300. Le projet devrait aboutir à une collaboration avec l'Université
du Québec à Montréal (John Drendel).
Le
contenu des programmes a d'abord été inventorié au
printemps 1998 par l'ensemble des médiévistes, français
et étrangers, réunis autour de cet axe de l'UMR. Des
réflexions initiales avaient été soumises au préalable.
De cette réunion il est sorti un bilan des approches à développer.
Certaines parurent mériter un approfondissement ou un renouveau,
d'autres encore inexplorées ou très peu abordées,
parmi lesquelles beaucoup portent sur des études sémantiques
ou sur le rapport oral/écrit.
Après ce bilan global,
les programmes ont fonctionné de manière autonome, sachant
que les thèmes se rejoignent souvent (ainsi l'étude des droits
de mutation et du marché de la terre ; celle des formes de la dépendance
et du prélèvement seigneurial dans son ensemble) et que tous
sont organisés autour du même noyau d'historiens, régroupés
dans une géométrie variable selon les programmes, où
ils exercent de plus ou moins grandes responsabilités et s'adjoignent
des collaborateurs extérieurs en fonction des orientations précises
et momentanées.
Programme I.
LE
MARCHE DE LA TERRE
Sous la responsabilité
de Laurent Feller et Chris Wickham
Bilan :
La rencontre des Treilles
a fait apparaître :
- la possibilité
de convergence entre démarches de l'anthropologues, de l'historien
et de l'économiste et l'intérêt de prolonger la collaboration,
qui apportent aux historiens une autre forme d'analyse des transactions..
- l'inégale attention
apportée à l'étude de la question selon les pays et
selon les moments. Son étude a donné lieu à de véritables
débats dans les pays anglo-saxons à la faveur de l'impulsion
donnée par Postan. En Italie, des études ponctuelles ont
bien eu lieu mais le marché de la terre n'a pas fait l'objet d'études
en soi avant les années 1980. Encore cette voie d'approche de l'histoire
économique est-elle peu pratiquée. En France cette question
est parfois abordée dans les thèses, mais plus souvent effleurée
que traitée à fond.
- la troisième partie
de la rencontre a permis de définir les axes d'une seconde rencontre
qui se tiendra en région parisienne, à Saint-Lambert-des-Bois
en juin 2001 (voir ci-dessous le programme des colloques). Elle sera organisée
en collaboration avec l'Ecole Française de Rome qui en assurera
la publication dans la collection ou dans un volume des Mélanges.
On y prospectera cette fois les méthodes à mettre en jeu
pour tirer le meilleur parti des séries documentaires disponibles,
à la fois de façon statistique et sociologique à travers
l'élaboration de grilles qui permettent de comprendre la logique
des transactions. Des études de cas seront proposées à
partir des actes de vente du haut Moyen Âge, de la documentation
notariale du bas Moyen Âge et des documentations seigneuriales disponibles
(essentiellement les court rolls anglais).
Les cinq « protocoles
» retenus :
" l'exploitation des registres
notariaux
" celle des comptabilités
seigneuriales disponibles
" l'étude de la
fiscalité seigneuriale sur les mutations
" le traitement statistique
des données sérielles
" les dossiers de mutation
d'un bien avant son absorption par un patrimoine ecclésiastique
A quoi, il convient d'ajouter
le traitement assez spécifique des sources manoriales anglaises.
Une publication commune
aux deux rencontres est prévue.
2001-2004 :
Le programme pour les quatre
années à venir est d'abord de réaliser les décisions
d'étude des Treilles. La rencontre de Saint- Lambert des Bois devrait
le permettre en très grande partie. Il sera alors décidé
s'il convient d'infléchir ou simplement de prolonger le programme.
RENCONTRE
de JUIN 2001 (ST LAMBERT des BOIS).
Programme
provisoire :
Vendredi 15
juin
Introduction
(L. Feller)
1) Etudes
de documents mis en série.
Agnès
Gramain (économiste, Paris-Dauphine), Laurent Feller (historien,
Marne la Vallée), Florence Weber (anthropologue, ENS) : Les affaires
de la famille de Karol fq Liutprand (ca 850-ca 880)
William Day
(Birmingham) : Trade Infrastructure in the Florentine Contado and its Impact
on the Rural Land Market
Richard Keyser
(Baltimore), Earthly Gifts and Heavenly Rewards : The decline of
Gift-Exchange and the Rise of a Commercial Model for pious Donations, 1100-1350.
2) L'exploitation
des documents notariaux
Carlos Laliena
(Sarragosse) : Documents notariaux de l'Aragon au XIVe siècle. Formation
de patrimoines et liens de clientèle.
John Drendel
(UQAM, Montréal): L'analyse du marché de la terre en Basse-Provence
avant la Peste Noire d'après les registres notariaux.
Luigi Provero
(Turin): La società rurale le abbazie cisterciensi nel marchesato
di Saluzzo (sec. XII-XIII), (titre à préciser un peu)
Samedi 16
juin
3) Les taxes
de mutation
Lluis To
Figueras (Gérone), Le marché de la terre d'après les
comptes seigneuriaux des taxes de mutation en Vieille Catalogne (fin XIIe-XIVe
siècle).
Emmanuel
Grelois (Tours), Les documents des chapitres de Clermont.
Julien Demade
(Strasbourg), La circulation des exploitations en Franconie au Xve siècle
: héritage et vente d'après les lods et ventes de la seigneurie
de l'Hôpital du Saint-Esprit de Nüremberg.
Dimanche 17
juin
4) La seigneurie
et le marché de la terre
Chris Dyer,
Titre non communiqué
Miriam Müller
(Birmingham): Seigniorial Control and the Peasant Landmarket in the 14tth
Century : a comparative apporach.
Philip Schofield
(U. of Wales) : The peasant land market ant the expectations of lordship
: England, 1200-c. 1350.
Conclusion
à plusieurs voix.
autres participants
: Patrice Beck (Paris 1), Stéphane Boissellier (LAMOP), François
Bougard (EFR Rome), Monique Bourin (Paris 1), Pascal Chareille (Tours),
François Menant, Ludolf Kuchenbuch (Hagen), François Menant
(ENS), Pascual Martinez Sopena (Valladolid), Carlos Reglero de la Fuente
(Valladolid), Dieter Scheler (Bochum), Chris Wickham (Birmingham)
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